Axe d’étude 2 : Ancrage et héritage

Dans le monde anglophone, marqué par des migrations de toutes natures, l’ancrage dans un
territoire et l’héritage d’une culture sont souvent au cœur de la construction de l’identité,
qu’elle soit individuelle ou collective.
L’héritage est souvent objet de fierté, voire de revendication : il s’agit dans ce cas d’assumer,
de clamer haut et fort son sentiment d’appartenance ou son patriotisme. On peut ainsi
s’intéresser à la manière dont les individus ou les communautés célèbrent leur culture et leur
héritage, via la littérature, les arts ou encore le sport et les traditions culinaires (épopées
vantant le « récit national » comme chez Walter Scott, mouvement du Celtic revival en
Irlande, événements comme les Highland Games). Cet héritage se constitue également à
travers la construction ou la préservation d’un patrimoine mémoriel, qu’il soit architectural, culturel ou naturel (statues historiques, musées, parcs nationaux, commémorations comme le Poppy Day ou organisations comme le National Trust au Royaume-Uni). Dans les communautés immigrées, la préservation de l’héritage permet de maintenir un lien avec la terre natale tout en enrichissant la culture du pays d’accueil, comme en témoignent des manifestations telles que le Notting Hill Festival à Londres, illustration du multiculturalisme au Royaume-Uni.
Parfois, cette célébration dépasse la simple revendication et prend la forme d’une lutte ou
d’un combat, tout autant pour la défense d’un territoire ou la maîtrise d’une frontière que pour
la préservation d’un héritage menacé, comme c’est parfois le cas pour les minorités (peuples
autochtones d’Australie et de Nouvelle-Zélande, des États-Unis ou du Canada par exemple),
pour lesquelles la préservation du patrimoine culturel et environnemental est une question de
survie. De même, l’enjeu historique de la frontière entre la République d’Irlande et l’Irlande
du Nord relève de ces luttes qui mêlent étroitement territoire, frontière, héritage et ancrage
culturel.
L’identification à un territoire est essentielle pour de nombreux artistes ou écrivains qui ont à
cœur de représenter leur terre ou région natale, que ce soit pour l’exalter ou pour en offrir
une vision nostalgique ou critique : le vieux Sud américain chez William Faulkner, Carson
McCullers ou Flannery O’Connor, New York chez Paul Auster ou Dublin chez James Joyce.
Ce territoire peut être rural (comme chez Robert Frost ou Thomas Hardy), mais également
urbain : il pourra être fructueux de s’intéresser notamment à la géographie de la ville américaine et à ses logiques de ségrégation sociale, telles qu’elles sont représentées par exemple chez Spike Lee (Do The Right Thing) ou dans la série The Wire.
Parfois enfin, la revendication d’un héritage ou d’un ancrage culturel ou territorial peut
conduire à des polémiques, des dérives ou des excès. Elle peut alors aller jusqu’à la
xénophobie et au repli identitaire. On peut s’intéresser par exemple aux controverses autour
de l’héritage confédéré dans les États du Sud des États-Unis ou autour de la frontière
américano-mexicaine, aux mouvements suprémacistes américains ou sud-africains, ou
encore à la façon dont le Brexit cherche à répondre en partie à des logiques de préservation
de l’identité et de souveraineté nationales du Royaume-Uni.