Axe d’étude 3 : Initiation, apprentissage

Dans le domaine de l’art, le roman d’apprentissage, abondamment représenté dans la
littérature anglophone, vient immédiatement à l’esprit (Bildungsroman, novel of education ou
novel of apprenticeship). The History of Tom Jones, a Foundling de Henry Fielding est
d’ailleurs considéré comme un prototype du genre. Aussi cet axe peut-il dans un premier
temps aborder l’évolution morale, intellectuelle ou psychologique du personnage, voire de sa
quête de lui-même (Oliver Twist de Charles Dickens ou The Mill on the Floss de George
Eliot) mais également celle du public, en raison des aspirations didactiques ou édifiantes de
nombreuses œuvres (Past and Present d’Augustus Egg sur le personnage typique de la
fallen woman à l’époque victorienne ; Pygmalion de G.B. Shaw).
Moment privilégié de l’apprentissage, l’enfance est souvent la première étape du roman de
formation. De Tom Brown’s School Days à Harry Potter en passant par Jane Eyre, un grand
nombre d’œuvres se déroulent dans un cadre scolaire et peuvent permettre d’aborder les
spécificités culturelles de chaque système : la dureté des punitions pour faire plier l’enfant
dans Boy de Roald Dahl, les dining clubs d’Oxford dans The Riot Club de Lone Scherfig, le
phénomène des fraternités ou des clubs aux États-Unis comme dans Glee de Ian Brennan,
Brad Falchuk et Ryan Murphy.
Néanmoins, le thème de l’initiation ne se résume pas au roman de formation. Le passage de
l’enfance à l’état d’adulte représente une étape cruciale d’un point de vue ethnographique,
en particulier chez les peuples premiers (rite initiatique du walkabout chez les aborigènes
d’Australie) et constitue également un thème riche dans les arts. Il permet d’explorer la
relation de l’enfant à sa famille (Matilda de Roald Dahl et plus généralement dans la
littérature jeunesse), les tourments de l’adolescence (The Breakfast Club de John Hughes,
The Catcher in the Rye de J.D. Salinger, Buffy the Vampire Slayer de Joss Whedon) ou la
construction de l’individu face aux injonctions et aux normes sociales (The Custom of the
Country d’Edith Wharton, Into the Wild de Sean Penn).

À l’âge adulte, ce qui forme l’individu, ce sont les expériences auxquelles il est confronté, un
voyage par exemple (dans la tradition du Grand Tour du XVIIIe ou XIXe siècle ou dans les
road novels et road movies américains de On the Road de Jack Kerouac à Thelma and
Louise de Ridley Scott) ou une rencontre avec un mentor (dans le milieu sportif pour Million
Dollar Baby de Clint Eastwood ou policier pour Mississippi Burning d’Alan Parker). Ce peut
être également une expérience professionnelle (celle des femmes dans les usines pendant
la guerre, incarnée par le personnage de Rosie the Riveter) ou encore un engagement
politique (celui des féministes qui firent leurs armes en militant pour la tempérance ou
l’abolition de l’esclavage).
Parfois, des expériences douloureuses et brutales précipitent l’apprentissage. L’épreuve du
deuil (Inside Out de Pete Docter), la cruauté du monde des enfants et la perte de l’innocence
(Lord of the Flies de William Golding) ou encore la violence du monde des adultes (romans
de Mark Twain, collections du Foundling Museum de Londres, récits de l’évacuation des
jeunes civils pendant le Blitz, photos d’enfants au travail de Lewis Hine) sont autant
d’éléments qui participent de l’initiation de l’individu. Quelquefois, l’apprentissage s’achève
même sur un échec qu’il s’agit de surmonter pour en ressortir grandi (It’s a wonderful life de
Frank Capra).